Il
ne peut y avoir de développement durable tant qu’une frange importante de la
population active reste en marge du processus de développement.
Le secteur rural demeure
incontestablement l’un des principaux moteurs de croissance de l’économie au Tchad,
depuis l’indépendance jusqu’aujourd’hui, à court et moyen terme à cause de la forte
implantation en milieu rural des populations tchadiennes (80%) qui pratiquent
l’agriculture et l’élevage.
Les femmes rurales, qui
représentent un quart de la population mondiale, sont majoritaires (52 %, soit
près de 5 millions d’habitantes). Selon les données du dernier recensement de
la population, la force de travail dans les domaines agricoles et l’élevage et
cueillettes sont constituées entre 50 et 70% par les femmes.
Les femmes produisent toutes sortes
de cultures vivrières. A cet effet, elles cultivent, achètent, vendent,
cuisinent et nourrissent leurs enfants et leurs familles. Elles accomplissent
la plupart du travail agricole et cultivent plus de la moitié de la nourriture
à l'échelle nationale. Leurs contributions sont cruciales pour le bien-être de
leurs familles et de leurs communautés ainsi que pour les économies locales et
nationales.
C’est aussi vrai pour la femme
rurale à l’échelle de l’Afrique. Selon l'Organisation internationale du travail
(OIT), les femmes africaines rurales produisent 80% de la nourriture et
effectuent la majorité du travail d'entreposage, de transport et de
commercialisation des produits. Ces femmes produisent la majeure partie des
cultures vivrières, en particulier dans le cadre de l’agriculture et l’élevage de
subsistance et effectuent la plus grande part des travaux domestiques non
rémunérés dans les zones rurales
Cependant les femmes rurales sont
confrontées à plus de difficultés que les hommes, notamment, en ce qui concerne
l’accès aux services publics, à la protection sociale, aux opportunités
d’emploi, etc. à cause notamment d’un manque d’éducation. Elles n’ont pas accès
à la propriété des terres. Ainsi, leur production ne leur appartient pas et
elles ne peuvent obtenir de crédits. Les hommes accaparent tous pour investir
dans l’alcool ou pour satisfaire leurs libidos alors que les femmes rurales
subissent la volatilité des prix alimentaires.
Les ressources tirées de leur
activité ne sont pas suffisantes pour l’accès à l'éducation, au matériel
végétal et aux soins de santé.
La principale entrave au développement
des femmes rurales est l’état d’analphabétisme qui concerne plus de 60 % des
femmes en milieu rural. Pourtant l’instruction constitue un facteur clé du
développement social et économique en ce qu’elle offre plus de chance à l’être
humain pour s’assurer une vie meilleure et participer pleinement à son propre
développement, puis à celui de sa communauté. Il existe une forte corrélation
entre le niveau d’instruction d’une population d’un pays et son développement
socio-économique. Il est démontré qu’il ne peut y avoir de développement
durable tant qu’une frange importante de la population active reste en marge du
processus de développement, faute de capacités professionnelles.
La forte proportion de femmes
analphabètes que présente le monde rural, et ce malgré les multiples efforts
fournis par les acteurs éducatifs, à travers les différents projets et
programmes d’alphabétisation qui y ont été exécutés depuis l’indépendance,
limite de fait, la participation de cette composante de la communauté aux actions
de développement et la prise en main par celles-ci, de son propre devenir.
Par ailleurs, l’environnement
économique et les conditions sociales dans lesquelles vivent les femmes en
milieu rural sont tels que celles-ci sont dans un état de pauvreté généralisé
qui, malheureusement risque de se perpétuer avec cette crise que traverse le
Tchad et la corruption qui règne du sommet jusqu’au bas de l’échelle. En effet,
les femmes rurales vivent dans une sorte de cercle vicieux dont il leur est
difficile de sortir sans des actions d’envergure. La situation de pauvreté des
femmes milieu rural est telle que beaucoup d’entre elles ne peuvent accéder à
une éducation de base conséquente. Les conditions socio-économiques des parents
en général, celles des femmes en particulier font souvent que des enfants en
âge d’aller à l’école ne sont pas inscrits dans des établissements scolaires,
ceux parmi eux qui accèdent à l’école quittent le système sans avoir fini le
cycle de base.
Une autre caractéristique des
femmes rurales, est que du fait qu’elles vivent en milieu rural et dans un état
ambiant d’analphabétisme, elles ne sont pas organisées, et donc arrivent
rarement à mettre en synergie leurs forces, leurs capacités et leurs
intelligences et tirer meilleur profit des actions à leur portée. Il faut
également souligner le manque de compétences techniques et professionnelles
chez les femmes rurales qui ne permet pas de donner de la valeur à leurs
produits, faute de formations techniques et spécifiques sur leurs activités de
subsistance.
En conséquence, il est
nécessaire d’élaborer un programme d’appui à la femme rurale en vue de
contribuer à l’amélioration des conditions socio-économiques à travers des
activités porteuses que conduiraient les femmes bénéficiaires elles-mêmes et
qui s’appuie sur des actions éducatives. C’est le sens de l’autonomisation des
femmes vivant en milieu rural et périurbain par le renforcement de leurs
capacités économiques.
Jean Philippe
Odinakachi